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Une réflexion sur 7 ans en tant qu'échevine de la mobilité à Jette


7 ans ont passé depuis que je suis devenu échevine de la mobilité à Jette. L'histoire a commencé le 27 janvier 2016. C'est comme si c'était hier mais parfois, j'ai l'impression que le monde était différent à l'époque.

Avec le recul, j'ai l'impression que les choses étaient plus faciles à l'époque.

Moins de protestations, moins de conseils communaux hargneux, moins de polarisation. Tout le monde semblait alors d'accord pour dire que les cyclistes devraient avoir plus d'espace à Bruxelles, les piétons plus de sécurité, les transports publics plus de régularité.


Aujourd'hui, les dossiers ont un parcours plus difficile. Mais en même temps, de nombreux endroits de la Commune sont plus agréables aujourd'hui qu'il y a sept ans, avec plus de verdure, plus de surfaces perméables, plus de bancs où les gens peuvent se reposer et se rencontrer. Le vélo type « long tail » qui conquiert la ville aujourd'hui - chargée de provisions ou d'enfants heureux - n'existait pas auparavant[ND1] . Et si les oppositions montrent une chose, c'est que nous avançons, que nous allons au cœur de la politique de mobilité.

La mobilité, c'est la répartition et le partage de l'espace. Donner plus d'espace aux résidents, au sens propre comme au sens figuré. Répartir l'espace de manière plus équitable entre les différents modes de transport, en veillant à la sécurité routière de tous et certainement des plus vulnérables. Ce ne sont pas des objectifs révolutionnaires. Avec Ecolo-Groen, nous les défendons depuis des décennies et la commune de Jette a déjà traduit ces grands principes dans d'innombrables dossiers. La reconstruction de la place du Miroir est encore relativement fraîche dans les mémoires, mais qui se souvient que même la Place Cardinal Mercier, en face de la gare, était autrefois un parking à ciel ouvert ? Ce qui est différent aujourd'hui, c'est l'échelle. Plus que jamais, la Région bruxelloise, sous l'impulsion de la ministre Elke Van den Brandt, défend une politique de mobilité cohérente et y consacre les budgets nécessaires. La configuration d'une zone résidentielle aujourd'hui n'est pas la même qu'il y a 7 ans. Il suffit d'examiner son utilisation réelle. Dans les zones résidentielles de première génération, les piétons se contentent presque toujours de marcher sur le trottoir. Même si en théorie la rue y est un espace partagé, en réalité elle reste le territoire des voitures en mouvement et en stationnement, le piéton le ressent et reste « gentiment » sur le trottoir. Les nouvelles zones résidentielles, si elles sont bien conçues, invitent à un réel partage de l'espace : respect des 20km/h, piétons au milieu de la rue, ... et cela grâce à plus de verdure et moins de places de parking.

Cela nous place au cœur du débat sur l'espace public. A chaque moment d'information sur le réaménagement d'une rue, la création d'une place, l'amélioration d'une ligne de tram ou de bus, les questions et donc le débat portent principalement sur les places de stationnement. Sur l'utilisation de l'espace, en d'autres termes. Parce que oui, pour tout le monde quasiment, les vélos, les piétons, les transports publics, devraient avoir plus de place en ville, mais souvent pas au détriment des voitures. Comme si l'espace était extensible.

Qu'il s'agisse de places de stationnement ou de plans de circulation, à chaque fois, une partie de la population se raidit. Et pour faciliter les choses, on qualifie des mesures de bonne gestion comme étant "anti-voiture". Et parce que la peur qu'on attribue à autrui a plus de poids que la sienne, on cite à la barre les personnes âgées, des personnes handicapées, des parents isolés avec enfants, des personnes à faibles revenus. Je ne comprendrais donc pas ces peurs ? Bien sûr que si. Pour moi, la notion de solidarité est essentielle dans le débat sur la mobilité. Près de la moitié des Bruxellois n'ont pas de voiture, certains parce qu'ils l'ont choisi, mais d'autres parce qu'ils n'en ont pas les moyens. Les familles les plus vulnérables vivent dans les quartiers les plus pollués, avec le moins de verdure et d'espaces de rencontre publics. Le réchauffement climatique les affecte le plus. Redistribuer l'espace public, assainir l'air, sécuriser les trajets vers l'école, assurer des transports publics ponctuels et confortables, c'est une question de solidarité à chaque fois. Nous avons tous des périodes dans notre vie où nous pouvons facilement nous passer d'une voiture et d'autres où la voiture est importante. Là encore, je plaide pour la solidarité. Si ceux qui n'ont pas besoin d'une voiture ne l'utilisent pas et n'en achètent même pas, ceux qui en ont besoin passeront moins de temps dans les embouteillages ou trouveront plus facilement une place de parking. La lutte contre le réchauffement climatique ne peut réussir que si les solutions sont solidaires et équitables.

Les opposants aux politiques de mobilité audacieuses en appellent à la participation. Oui, ça pourrait être mieux. La période Covid ne nous a pas aidés, et les communes et même les bureaux d'études manquent encore d'expertise ou de ressources, également en raison de l'hyper-diversité bruxelloise. Mais soyons honnêtes : pour certains interlocuteurs, leur propre agenda joue un rôle plus important que le désir de mettre en place le meilleur processus participatif possible. Les responsables politiques sont élus démocratiquement et doivent oser faire des choix clairs et les défendre. Parfois, en tant qu'échevine, on m'accuse de ne pas avoir lancé un processus participatif sur l'emplacement d'un vélobox ou d'un emplacement Cambio... Gardons la mesure.

Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. En vacances à Gand, Utrecht ou Bordeaux, je ne le réalise que trop bien. Mais en tant qu'échevin de la mobilité, je sais aussi que toutes ces villes ont connu des moments de protestation. Des moments clés, où la politique de mobilité est passée à la vitesse supérieure et a brisé les vieilles habitudes, où des choix ont dû être faits dans l'utilisation de l'espace. Pour la région bruxelloise et pour ma commune, après des années de réalisations concrètes qui changent peu à peu les quartiers, nous arrivons aussi à un moment clé, après un gros travail d'associations ou d'habitants engagés. J'accepte volontiers que les conditions de travail soient moins évidentes qu'il y a sept ans. Et j'attends avec espoir une ville où mobilité durable et solidarité vont de pair, où la voiture est une humble invitée et non le glouton dominant d'aujourd'hui.

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